Les motivations d’un article contre le communautarisme catho
Cet article n’est qu’une courte introduction au numéro des Epées sur le communautarisme catho. Une simple mise en bouche. L’essentiel est dans la revue.
Pourquoi s’attaquer au communautarisme catho ? Je ne suis pas pour la réduction de la religion à la sphère privée. Ce qui me pose problème ce n’est pas le fait communautaire ou la volonté des catholiques de construire une société conforme aux valeurs qu’ils portent. Il est par ailleurs bien évident que la foi produit de la culture car les communautés chrétiennes sont historiques. Ce qui me préoccupe c’est justement le destin historique de la culture d’origine chrétienne. Aujourd’hui, elle est parfois défendue en tant qu’identité sociale, racine historique, héritage, mais la foi devient seconde voire elle est instrumentalisée au service de cette culture et de cette société. Des groupes sociaux vont mobiliser la
référence chrétienne comme facteur de cohésion et de distinction pour définir de manière inclusive et exclusive ce qu’est leur groupe. Or, selon moi, il y a là une déviance terrible, car c’est la foi même, sa nature et son autonomie qui se trouve niée. Quand j’entends des « identitaires » qui ont la nostalgie du national, du local, du rural, du familial, du catholique, (etc.), je vois que la foi est mise sur le même plan que d’autres types d’appartenance dans la seule finalité politique et sociale d’exclure. Réaction qui se comprend très bien dans le contexte de la mondialisation. Sauf que la foi n’a rien à voir avec cela.
La foi n’est pas héréditaire Sans doute Dieu œuvre par les médiations humaines. Nous héritons d’une culture chrétienne, nos pères nous ont transmis la Révélation. Mais attention : dans l’Eglise, la succession apostolique n’est pas une succession héréditaire. C’est Dieu qui appelle ! De la même manière, la foi ne s’hérite pas, elle est un don de Dieu : c’est la conversion personnelle, une relation d’amour et de fidélité au Christ. La foi n’est pas la propriété d’un groupe social ou d’une culture. Elle est un dépôt à transmettre à toutes les nations. La foi ne peut être mobilisée contre les païens, les incroyants ou les gentils sans dénaturation profonde. La croix du Christ ne peut être un étendard d’un groupe de « parfaits » contre le reste du monde, car sur sa croix le Christ est mort pour tous les hommes.
Le communautarisme : nostalgie de la religion civile Le communautarisme – qui n’a rien à voir avec l’existence de communautés spontanées ou organisées de chrétiens – vise sur le mode anglo-saxon à faire exister les catholiques comme un groupe social, avec une culture, contre d’autres groupes sociaux ou confessionnels. Le communautarisme est à la fois fruit du conflit et instrument dans le conflit. Il est une réponse au multiculturalisme croissant des sociétés occidentales. Il tente une coalescence des individus héritiers d’une même identité pour éviter leur dissolution dans la grande soupe de la « world culture ». Mais la foi n’est pas un instrument au service de la survie d’un groupe ou d’une culture. Il faut veiller à ce que les « catholiques et français toujours » ne tombent pas dans le contre témoignage en instrumentalisant la foi. Le spirituel ne doit pas être assujetti au temporel. Il y a dans le rapport des communautaristes au catholicisme une nostalgie inavouée de la religion civile. L’apologie d’une « Eglise de l’ordre » dont les seules vertus valables seraient sociales n‘est pas loin… Sous couvert d’une pseudo finalité apostolique, le communautarisme catho est surtout une sécularisation radicale du catholicisme, une dénaturation profonde de la Nouvelle Alliance, bref le retour du grand inquisiteur…
Alain Raison
Voici les lettres qui nous ont été adressées suite à l'article paru dans le n°23. Vous pouvez les télécharger au format PDF.
Réponse de Paul-Marie Couteaux
Réponse de l'Abbé Guillaume de Tanouarn
Réponse de Jacques de Guillebon
Réponse de Falk Van Gaver
Réponse de Henri Peter
Réponse de Jean-Pierre Maugendre