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les épées - Page 114

  • N°10 - René Fallet, un prophète disparu

    Seule dans toute la presse, Les Epées ont rendu un hommage à René Fallet… 
     
    Par Xavier Trébord

     
    À l’heure où les canons de l’humour semblent indissociables de la dérision ou de la parodie vaguement provocatrice, celui de Fallet a la consistance, la saveur et le puisant fumet d’une soupe d’antan. Un humour grinçant, loufoque, mais efficace aussi : quelques croûtons bien frottés d’ail nagent dans la soupière, et viennent nous rafraîchir l’haleine.
     
    Mais Fallet est aussi un chroniqueur (et non pas un faux témoin), qui nous livre une parcelle de mémoire populaire rarement évoquée aujourd’hui, peut-être par mauvaise conscience, sûrement par désintérêt. Dans son premier roman, Fallet, natif de Villeneuve Saint-Georges, nous présente une bande de gouapes de banlieue ; il est peu probable que cette bande reconnaisse aujourd’hui le théâtre de ses exploits, de même que son argot plantureux ne lui serait pas d’un grand secours à l’improbable rade du coin. Aussi, qui se souviendra dans cinquante ans de cette époque où Paris n’était pas entouré de barres conglomérées, mais de villages et de bourgs presque jaligniens ?
     
    Fallet est, comme son fidèle comparse Brassens, un barde de l’amitié. Une amitié rude, épaisse, plutôt du goût de celle du régiment ou du zinc. Avec Jules Romains (Les copains) et l’ineffable Antoine Blondin, Fallet est un des plus pertinents descripteurs de ces ambiances empuanties de Caporal ou de petit gris, dans lesquelles une bande agglutinée au comptoir lève l’ancre et quitte le monde des vivants pour atteindre celui des viveurs. Les tournées se suivent et ne se ressemblent pas, les mouches essaient désespérément de coller au fond des verres, dans lesquels la marée pinardière monte et descend à un rythme endiablé. Nos héros, ayant atteint leur taux de croisière, se jettent à corps et âmes perdus dans des débats philosophiques ou sociétaux (Hou ! Le vilain mot...) d’une paradoxale lucidité. Et si d’aventure on se fâche, il est de bon aloi, après quelques rafales de chevrotine, de faire la paix autour d’un canon, pacifique celui là, et qui, comme le malheur, n’arrive jamais seul.
     
    Allez, mon Glaude, on va s’en jeter un ?
     
     
    Xavier Trébord
     

  • N°9 - Editorial "Humour et politique"

    Qu’elle se vérifie par l’abstention, par le primat absolu de l’économie ou par un processus européen à marches forcées, la décomposition du Politique constitue sans conteste l’un des faits majeurs de notre temps. Elle ne trouve pas d’équivalent dans le passé de la France, et paraît accentuée par la tendance des “élites” à « sacrifier la patrie à l’humanité », une humanité sans couleur ni relief, déracinée et close sur elle-même. Face à cet avenir morne, il s’agit donc de réapprendre le sens du bien commun, de retrouver le goût capétien de l’unité, de sortir des impasses mortelles de la modernité radicale.

    Sorties du fourreau en 2001, Les Épées entendent braver ces maux, et croiser le fer. Les deux années qui viennent de s’écouler (huit numéros), l’accueil chaleureux qu’on lui a fait, les collaborations prestigieuses qu’elle s’est assurée, invitent notre revue à préciser son contenu et ses intentions. Nullement retranchées dans un horizon purement contestataire, Les Épées se présentent avant tout comme une revue royaliste, qui se réclame aussi bien de Maurras et de Daniel Halévy que de Bernanos et de Boutang, des non-conformistes de droite, mais aussi de la tradition thomiste ou du libéralisme politique. Sans rabâchage, avec la volonté d’actualiser le matériel critique, de s’enrichir au contact de tous les lieux où vit l’Esprit, cette revue se propose d’analyser les différentes formes de vie et de mort du Politique, les principaux débats (en politique, en philosophie, en sociologie et dans les Lettres ou en Droit), et d’exalter la culture française qui paraît le mériter. Son objet original est de redéfinir et de faire connaître les raisons et les projets du royalisme français à l’orée du XXIe siècle, au fil des articles, des dossiers, et des compte rendus qui privilégient la confrontation des idées. Pour toutes ces raisons, Les Épées ambitionnent de devenir une référence pour tous les royalistes, mais aussi pour tous ceux qu’intéresse le maintien de la liberté de l’esprit.

    Puisqu’elles ne sont l’organe d’aucune organisation, et qu’elles travaillent sur un plan essentiellement intellectuel, Les Épées peuvent, sans rien renier de leurs principes, transcender les appartenances des rédacteurs et de son lectorat. Elles doivent apparaître comme un pôle de réflexion capable d’enrichir les fidélités de tous.

     

    Les Épées